Ce numéro Varia s'articule autour de deux thématiques : les mobilisations des minorités sexuelles dans des contextes nationaux très contrastés et le renouvellement des conditions d'accès aux élites françaises dans un contexte de libéralisation de l'économie.
Le premier article s'interroge sur l'émergence et le développement d'un « espace de la cause dite LGBT » en Tunisie à partir de 2014-2015. Il questionne plus précisément les processus de socialisation des militant.e.s. des principaux mouvements LGBT en Tunisie dans un contexte post-révolutionnaire marqué par l'élargissement du champ politique et des espaces de socialisations afférents.
Le deuxième article porte sur deux cas de coopération transnationale au nom de la solidarité avec le mouvement gai et lesbien polonais. Il révèle les effets d'inégalités matérielles, culturelles et symboliques entre Europe de l'Ouest et de l'Est. Des rapports de force traversent ainsi les relations de solidarité qui peuvent néanmoins évoluer dans le temps, vers plus de réciprocité ou au contraire se dissoudre.
Dans la seconde partie, le troisième article montre de quelles façons les inégalités sociales se reconstituent une fois passées les portes des grandes écoles en France, entre d'une part les élèves issus des classes populaires et les autres d'autre part, sur une période allant des années 1920 aux années 1970. Les grandes écoles ne constituent donc pas une « voie royale » pour tous, les moins dotés n'accédant qu'à des positions « refuge » au sein de la haute fonction publique.
Le dernier article restitue enfin l'univers social dans lequel évoluent deux hauts fonctionnaires dotés d'un certain sens du jeu et de capitaux bureaucratiques (l'un technique lié à la détention de diplôme, l'autre davantage fondé sur l'expérience) qui, loin de s'opposer, se révèlent complémentaires pour peser sur les décisions politiques qui ont ouvert la voie à la libéralisation de la finance.
Concept très controversé, le « semi-présidentialisme » pourrait néanmoins répondre à la contradiction qui traverse le citoyen contemporain : besoin démocratique accru versus désir d'un leadership fort.
Après le président F. D. Roosevelt et le général de Gaulle, Pouvoirs se consacre à une autre grande figure du XXe siècle, mais encore de notre temps : la reine Élisabeth II, qui fêtera cette année ses 70 ans à la tête d'une monarchie en pleine tourmente.
Tandis que l'Europe voit la guerre frapper à la porte, Pouvoirs se penche sur sa plus belle rive : espace de prospérité projetée ou de responsabilité partagée ?
Les sciences sociales sont attaquées ! Le ministre de la recherche en personne menace la sociologie et lance une grande inquisition contre l'« islamo-gauchisme » qui « gangrène » l'Université, un président de région veut couper des crédits à un institut d'études politiques, de grandes mobilisations s'élèvent contre le « wokisme »...
Enfin les sciences sociales retrouvent leur place en dissidence ! Enfin le pouvoir réagit ! Quel triomphe pour la sociologie !
Ce numéro revient sur les attaques dont la sociologie a récemment fait l'objet et montre qu'elles mettent en cause des acquis les plus élémentaires des sciences sociales, tout en revenant sur le paradoxe apparent de ces sciences sociales : toujours politiques parce qu'elles parlent du monde social, elles n'ont de force sociale que parce qu'elles se revendiquent de la science.
Une autre perspective s'ouvre alors qui fait de ces attaques contre les sciences sociales un objet d'analyse : comment expliquer sociologiquement les réticences à la sociologie ?
Nicolas Brusadelli et Yannick Martel s'intéressent aux luttes qui animent aujourd'hui le « mouvement climat », à partir d'une enquête sur la construction du mouvement « Alternatiba ». Tout en appréhendant les différences de labélisation du « politique » du point de vue des acteurs, ils tentent aussi d'analyser les stratégies concrètes, d'affiliation ou de mise à distance, déployées en direction du champ politique.
Fabien Desage, Clément Barbier, Antonio Delfini éclairent l'inscription localisée et historiquement ancrée des transformations du capitalisme, en s'intéressant à l'émergence d'un marché de la promotion immobilière dans l'agglomération lilloise, au tout début des années 1960. Loin d'être la conséquence mécanique de processus externes, celle-ci apparaît largement dépendante des investissements précoces de grands industriels locaux ou de leurs héritiers, mais aussi des reconfigurations de l'action publique locale.
W. E. B Dubois a publié en 1920, à New York, l'ouvrage Darkwater: Voices from Within the Veil. Le chapitre «The Souls of White Folk» (« Les âmes du peuple blanc ») est traduit dans la revue pour la première fois. Nicolas Martin-Breteau analyse ce chapitre et montre que l'imposition d'un régime de « suprématie blanche » dans le monde ne constitue pas une « aberration » au regard des valeurs défendues par l'Europe, mais qu'il est l'aboutissement logique de la construction des États-nations occidentaux.
À l'heure où paraissent ces « cahiers », trois mois sont passés depuis que la pandémie mondiale du Covid-19 s'est imposée à nous, trois mois que le monde entier a basculé dans un état de crise dont on ne voit pas l'issue et dont on ne mesure pas les effets sur les sociétés qu'il a frappées.
Aux premières heures du confinement, des sentiments nombreux et contradictoires nous ont toutes et tous traversés : de la sidération à l'angoisse, de la tristesse à la colère... Et puis, très vite, les questions se sont bousculées dans nos têtes : que s'est-il donc passé ? Mais que nous arrive-t-il ? Quelles conséquences cet événement aura-t-il sur le monde et sur nos existences ? Et quelles leçons en tirer ? Il faut dire que, pour beaucoup d'entre nous, la vision d'un monde littéralement arrêté a soudain rendu évidentes, presque sensibles, les contradictions insoutenables dans lesquelles ce monde se trouvait pris depuis trop longtemps. Et si cette catastrophe était l'occasion d'empêcher qu'il retrouve sa trajectoire catastrophique antérieure ?
Comme le disait magnifiquement un graffiti repéré sur un mur de Hong Kong, « we can't return to normal, because the normal that we had was precisely the problem». Autrement dit, serons-nous capables de saisir cet événement, à la fois le comprendre et nous en emparer, afin d'imaginer et construire le monde que nous voulons, le monde dont nous rêvons ?
Ces « cahiers » ne pouvaient être que collectifs, au sens fort, parce que issus d'une volonté partagée par les éditeurs et auteurs de la maison de faire sens face à l'événement. S'y engage une conception du travail intellectuel et du débat public comme espace de confrontation argumentée. Ils accueillent des textes de pensée offrant des perspectives et des analyses fortes, mais aussi des textes et propositions littéraires qui font résonner notre époque dans des formes et des formats singuliers, ainsi que des interventions graphiques. Cette crise bouleverse les cadres de pensée et d'interprétations, elle met à l'épreuve bien des certitudes et des convictions, ce qui imposait d'ouvrir un espace original de dialogue, où trouvent à s'exprimer des sensibilités intellectuelles diverses, où peuvent s'ordonner la confrontation des points de vue, les divergences de fond, les incertitudes et les interrogations.
Les catastrophes s'enchaînent, les crises se suivent, les désastres ne se comptent plus. Et un consensus semble s'imposer : il faut changer, bifurquer pendant qu'il est encore temps, emprunter la voie de sortie.
Mais où est-elle, cette issue ? Alors que les derniers mois ont rétréci notre espace physique et diminué notre espace critique, comment retrouver de l'air, du rêve, de la capacité d'action ? Sur quoi faut-il agir ? A quelle échelle et sur quel mode ? Allons-nous laisser passer l'occasion de tout transformer ?
Le Seuil tente, avec cette deuxième livraison des Cahiers éphémères et irréguliers, de nourrir ces interrogations bien légitimes en offrant plus d'une vingtaine de textes, d'entretiens et de dialogues qui à la fois décrivent exactement où nous en sommes et croisent les points de vue (parfois aussi le fer).
Rutger Bregman s'y demande comment profiter de cette crise pour renverser la situation. Pierre Rosanvallon nous invite à inventer de nouveaux outils démocratiques pour faire face à la multiplication des états d'urgence. Aurélie Trouvé débat avec Laurent Jeanpierre et Razmig Keucheyan des stratégies possibles pour sortir du libéralisme. Tandis qu'Arlette Farge ouvre la voie à la littérature en rappelant notre fragilité, Michaël Foessel rappelle que l'infantilisation actuelle n'est qu'une interprétation inepte de ce qu'est la véritable puissance de l'enfance. Emanuele Coccia et Mathieu Potte-Bonneville réfléchissent à la place que nous voulons vraiment donner aux non-humains, interrogation qui a des échos dans les textes des écrivains Benjamin Labatut et Kapka Kassabova.
On ne changera rien sans horizon, ouvrons-le, ouvrons les cahiers !
Qu'est-ce, au jour le jour, qu'être un juge « indépendant » ? Vit - on sous le « gouvernement des juges » ? La justice est-elle « instrumentalisée », « politisée », « laxiste » ? Afin de sortir des idées reçues, Pouvoirs se donne pour mission de questionner à nouveaux frais certaines notions qui ne cessent de perturber le débat public. Contribue notamment à ce numéro : Nicole Belloubet, précédente garde des Sceaux.
Au tournant du XXIe siècle, le luxe est devenu une puissante industrie planétaire. La création de grands conglomérats, la réorganisation de ce secteur sous l'égide de puissants investisseurs, la conquête de nouveaux publics liée à l'ouverture de nouveaux marchés, notamment en Chine, témoignent de cette expansion. Le commerce du luxe est aujourd'hui celui qui engendre les profits les plus spectaculaires, et il a connu ces vingt dernières années une croissance exponentielle. Le luxe semble incarner le triomphe du matérialisme, avec l'exaltation et l'ostentation de la richesse. Au luxe, on associe la dépense, l'excès, la transgression.
Toutefois, le fait d'être devenu une industrie de masse menace en permanence une autre de ses composantes, la rareté. La mondialisation du luxe induit en effet une tension entre des formes d'uniformisation et la réémergence d'un registre de diversité thématisé par les acteurs en termes de patrimoine, d'identité, d'authenticité, de savoir-faire spécifiques. Cette relation complexe entre élitisme et banalisation oblige dès lors à une réinvention permanente qui le caractérise.
Pour autant, le luxe ne se donne pas seulement à voir à travers un univers d'images et de symboles. Il produit en permanence sa propre réflexivité dans le récit qu'il tisse autour de ses productions. Ce récit met en jeu un ensemble beaucoup plus large de représentations qui s'attachent à l'état du monde, au statut de la personne et aux rapports entre nature et culture. Loin d'être une bulle imperméable aux évolutions du monde, le luxe alimente l'imaginaire social et entre en résonance avec l'histoire et les changements contemporains. La période récente en témoigne qui a vu la crise écologique et la crise sanitaire remettre en cause les effets délétères de la mondialisation en plaçant au premier plan la question de la survie et la valeur de durabilité.
Découvrez une présentation du n°152 de la revue Pouvoirs par Marc Guillaume, codirecteur de la publication, Gilles Kepel professeur à Sciences Po, et Alexandre Kazerouni, docteur associé au CERI en cliquant ici : https://www.youtube.com/watch?v=XULm5O1khUE&feature=youtu.be GILLES KEPEL Le noud gordien des états arabes du Golfe FATIHA DAZI-HÉNI La résilience des monarchies du Golfe dans un monde arabe en plein tumulte STÉPHANE LACROIX l'Arabie saoudite : un magistère sur l'islam contesté CÉCILE MAISONNEUVE et MAÏTÉ DE BONCOURT Révolution énergétique, révolutions politiques ?
STEFFEN HERTOG Retour aux années 1970 ? la jeunesse du Golfe et les économies de la rente après le Printemps arabe ALEXANDRE KAZEROUNI : Musées et soft power dans le golfe Persique ÉRIC MINNEGHEER : Justice et libertés dans les émirats et monarchies du Golfe DENIS BAUCHARD : La France et les émirats et monarchies du Golfe Un partenariat d'intérêt mutuel MOHAMED-ALI ADRAOUI : Du Golfe aux banlieues ? Variations sur le thème de « l'islamisation de l'occident » SULTAN SOOUD AL-QASSEMI et MAHMOOD SARIOLGHALAM : Le golfe vu des Émirats arabes unis et de l'Iran. Entretiens avec Gilles Kepel JACQUES LERUEZ : Lettre d'Édimbourg. Le référendum du 18 septembre 2014 en Écosse : l'échec d'un long processus PIERRE ASTIÉ, DOMINIQUE BREILLAT et CÉLINE LAGEOT : Repères étrangers (1er juillet - 30 septembre 2014) PIERRE AVRIL et JEAN GICQUEL : Chronique constitutionnelle française (1er juillet - 30 septembre 2014) Summaries
Ce numéro propose un renouvellement de la sociologie du travail et des professions. Il repose sur deux arguments majeurs : d'une part, il fait sociologiquement peu de sens de séparer l'analyse du travail - en tant que type de pratiques -, de celle des ensembles organisés que sont les professions. D'autre part, les travailleurs et travailleuses étant également des agent.e.s inscrit.e.s au sein du macrocosme social, leurs positions et pratiques doivent être replacées dans des rapports sociaux qui dépassent leurs espaces professionnels.
Les articles réunis dans ce numéro montrent que la matrice théorique de Bourdieu permet de repenser des concepts phares comme celui d'autonomie professionnelle, en inscrivant la réflexion dans celle, plus large, de la différenciation sociale, tout en étant attentif aux trajectoires sociales comme professionnelles des individus.
Ce retour à une sociologie générale permet ainsi de mettre en lumière ce qui se joue au sein des espaces professionnels comme ce qui, alentour, participe à en déterminer la structuration, les enjeux, et les divisions. La puissance heuristique d'une telle approche tient au fait qu'elle permet de rendre compte de la relation entre les structures mentales des travailleurs et travailleuses - leurs dispositions professionnelles -, et la structuration de leurs espaces professionnels.
Depuis la fin des années 1990, les entreprises ont développé des formes internalisées d'action « éthique ». D'abord promues à travers la reconnaissance et la prise en charge d'une « responsabilité sociale des entreprises » (RSE) en matière de conditions de travail de leurs sous-traitants ou d'interventions sur des questions de société, ces formes d'action se sont ensuite diversifiées. Les années 2000 et suivantes ont en effet vu se multiplier les politiques d'égalité professionnelle, de diversité, de mécénat de compétences, de bénévolat d'entreprise ou d'intégration des enjeux environnementaux. Ce sont finalement autant d'objectifs éthiques qui ont été intégrés au management des firmes et se sont vus pris en charge par des dispositifs de gestion cherchant à les contrôler, les mesurer, les optimiser, les afficher. La particularité de ce management de l'éthique est d'incorporer la morale dans le modèle économique des entreprises, tout en continuant à revendiquer la recherche de profit.
Ce numéro interroge les dispositifs qui font exister cette équivalence entre morale et profit, en partant de celles et ceux qui les mettent en oeuvre : s'agit-il, pour ces professionnels, de « moraliser » le capitalisme, de capitaliser sur la morale ou d'articuler - et dans quelles conditions - recherche du profit et quête de la vertu ?
Les articles rassemblés montrent le travail effectué par ces travailleurs et travailleuses de la vertu, aux propriétés sociales particulières, pour faire tenir ensemble des éthiques opposées, dont l'équivalence n'est pas donnée. Ils permettent également de comprendre comment cette évolution du capitalisme contribue à transformer les causes morales que celui-ci endosse.
La Ve République et les partis Pascal Jan.
Raisons et évolution du rejet des partis Nicolas Sauger.
L'épreuve du pouvoir est-elle vouée à être fatale au parti socialiste ? Retour sur le quinquennat de François Hollande Frédéric Sawicki.
Les partis politiques et l'outil numérique Michaël Bardin.
Modes de scrutin et système de partis Bernard Dolez et Annie Laurent.
La crise du militantisme Julien Fretel.
L'argent et les partis Romain Rambaud.
La démocratie partisane à l'épreuve des primaires Éric Treille.
La fin de la discipline partisane Dorothée Reignier.
L'étude des partis politiques : entre permanence et renouveau Carole Bachelot.
Chroniques.
Le racisme n'est pas une idéologie spontanée, née de l'ignorance. Il est le produit de débats et de travaux scientifiques qui ont fleuri principalement en France, en Grande-Bretagne et en Allemagne dans le dernier quart du xixe siècle. Quant aux idéologies coloniales, elles ont été les réceptacles d'une théorisation sauvage de la notion de race qui considérait les peuples colonisés et leurs cultures comme relevant de races inférieures.
À la vieille conception chrétienne postulant le monogénisme de l'humanité, créée par Dieu à son image... et donc blanche à l'origine, s'est substituée au xviiie siècle l'idée d'une dégénérescence de certains rameaux de la race blanche qui auraient donné les autres races. C'est ce que pensait encore Buffon. Cette thèse a été ruinée par le darwinisme qui a mis en évidence les liens originels de l'espèce humaine avec les singes supérieurs. Elle a été également contredite au xxe siècle par les découvertes de restes hominiens en Afrique subsaharienne très antérieurs aux plus anciens squelettes humains trouvés en Europe.
Le développement de la génétique humaine et plus particulièrement la découverte de l'ADN ont montré que la transmission héréditaire des caractères physiques obéit à des mécanismes trop complexes et trop aléatoires pour donner plus de visibilité à la reproduction de traits communs qu'aux formes de différenciation et d'individualisation.
Depuis la fin de l'année 2010, les bouleversements politiques et sociaux dans le monde arabe sont au centre de toutes les attentions et notamment de l'attention académique. Les chercheurs en sciences sociales n'entendent pas se laisser dicter leurs objets par l'actualité mais refusent dans le même temps de démissionner devant les faits ou de s'emmurer dans leur tour d'ivoire, feignant d'ignorer la gravité du monde qui les entoure et l'urgence d'une pensée construite et contrôlée.
C'est à cet exercice délicat que se sont livrés les auteurs de ce dossier, sans cesse pris dans une forme d'injonction paradoxale : prendre de la distance avec l'événement historique et saisir son épaisseur sociale dans toute sa matérialité, réfuter les explications causales macrosociologiques et prendre au sérieux les revendications et les répertoires d'action des protestataires, résister au diktat de l'instant et de l'accélération de l'histoire et réinscrire les pratiques et les discours dans leur terreau sociologique et historique.
L'objectif n'est pas de proposer une nouvelle interprétation des événements qui ont bouleversé la région mais bien plutôt de comprendre, au moyen d'enquêtes de terrain de longue haleine, comment ceux-ci ont bousculé les structures sociales et politiques des pays concernés et de quelles façons cette histoire courte est à réintégrer au sein des mutations sociales plus larges qu'ont connues ces sociétés.
Fondés sur un travail empirique inédit, les six articles étudient ainsi les conséquences du déclassement des chômeurs diplômés tunisiens sur leurs dispositions à se mobiliser (Pierre Blavier), la recomposition du capital social des insurgés dans le cas syrien (Gilles Dorronsoro et al.), l'impossibilité du soulèvement dans le cas algérien (Layla Baamara), le rôle de groupes professionnels comme les avocats dans la révolution tunisienne (Eric Gobe), les voies de la reconversion politique des Frères musulmans égyptiens entre 2005 et 2012 (Marie Vannetzel) et les modalités du passage d'une situation révolutionnaire à un résultat révolutionnaire dans le contexte tunisien (Choukri Hmed).
L'observation de la destruction des Juifs d'Europe à la loupe permet de penser le processus de mise à mort autrement, d'éclairer différemment les relations entre victimes et bourreaux, de replacer les comportements individuels dans leurs environnements sociaux pour conférer à ceux-ci une valeur explicative propre, de renouveler l'histoire de la Shoah.Ce volume aborde l'histoire des persécutions antisémites et de la Shoah à partir d'un angle local. Cette démarche micro-historienne parcourt l'ensemble de cette livraison du Genre humain. Ainsi, il ne s'agit pas uniquement d'identifier et de compter parmi les victimes combien ont été spoliés, cachés, arrêtés ou déportés, mais encore de savoir qui ils étaient et en quoi ils se distinguaient (ou non) de ceux qui ne l'ont pas été. Procédant ainsi, on se donne les moyens de comparer des trajectoires individuelles ou familiales sinon laissées à leur singularité, mais également de dépasser les jugements psychologiques quant aux comportements et actions des personnes observées. Les choix effectués ne sont plus pensés comme des décisions morales censément effectuées en toute connaissance de cause, ni évalués au prisme des catégories de jugement des historien(ne)s ou de ses lecteur(rice)s, mais rapportés au contexte familial, social, économique ou répressif dans lequel ils prennent place. Le changement d'échelle mené de la sorte permet ainsi de rompre avec la seule logique individuelle et nominale, avantage considérable lorsqu'on traite de questions controversées et enjeux de mémoireIl éclaire d'un jour nouveau la place du " moi " dans sa relation avec l'écriture historienne.