«Et ceci, mes chers concitoyens, nous ramène une dernière, toute dernière fois, à mes erreurs:oui, j'ai graissé des pattes, fait de fausses promesses, et probablement un tas d'enfants illégitimes, j'ai menti et j'ai trompé, j'ai été mauvais. En résumé, les amis, j'ai été l'un d'entre vous!»Que nous diraient les défunts de Paulstadt s'ils pouvaient s'exprimer une dernière fois? Il suffit de tendre l'oreille pour le savoir. Car dans le cimetière de ce petit village autrichien, leurs voix bruissent. D'anecdotes en confidences, la communauté reprend vie sous nos yeux:le maire, l'institutrice, le curé disparu dans l'incendie de l'église... Au fil de cette chronique tendre et pleine d'humour, c'est le portrait d'une humanité incroyablement attachante qui se dessine.
«Alors comment se fait-il que tout le monde tombe amoureux partout, à tout bout de champ?
- Jeune homme, dit Freud en marquant un temps d'arrêt, on n'a pas besoin de comprendre l'eau pour y plonger tête la première.» En 1937, Franz débarque à Vienne chez Otto Tresniek, un buraliste unijambiste. Au tabac Tresniek, où se mêlent classes populaires et bourgeoisie juive, il fera l'apprentissage de la vie. Conseillé par Otto et un vieux docteur malade, fidèle client du tabac du nom de Sigmund Freud, Franz tente de séduire Anezka, une artiste de cabaret dont il est tombé amoureux.
L'humour viennois d'Otto Tresniek et de Freud est la politesse du désespoir dans une société déboussolée où ils ne trouvent plus leur place. Pas plus que leur protégé, qui tentera pourtant, fidèle à leur enseignement, de nager à contre-courant.
Sur le pont du paquebot qui le ramène en Europe après une ultime saison à New York, Gustav Mahler laisse dériver ses pensées. À cinquante ans, il est un compositeur adulé et le chef d'orchestre le plus réputé de son temps, mais son corps souffrant lui rappelle que la fin est proche. Emmitouflé dans une épaisse couverture, l'oeil rivé sur la mer grise, son esprit dévide des souvenirs, surgis à la faveur d'une sensation fugace - le cri d'une mouette, l'ombre d'un nuage...
Robert Seethaler excelle à suggérer en quelques traits le pur bonheur des étés à la montagne, tout comme, dans un registre bien différent, la décennie pendant laquelle Mahler a réformé et dirigé l'Opéra de Vienne. L'amour tourmenté du musicien pour sa femme Alma, son chagrin à la mort de sa fille aînée et, bien sûr, la haute conception de son art traversent ce texte aussi bref que profond.
Sans la moindre emphase, l'écrivain restitue la légendaire exigence du maître, bourreau de travail malgré sa faible constitution, de même que sa quête permanente de la beauté.
C'est sans doute de son apparente simplicité que cet intense roman tire sa force. Les rares mots échangés face à l'océan entre l'illustre passager et le jeune garçon de cabine chargé de veiller à son bien-être sont à cet égard exemplaires.
Portrait tout en intériorité d'un artiste dont le génie ne s'est jamais tari, Le Dernier Mouvement est également une poignante méditation sur la puissance de la création.
Né à l'aube du XX? siècle, Andreas mène une vie humble au coeur des Alpes autrichiennes. Il prend part à l'aventure des téléphériques qui vont ouvrir sa vallée à la modernité, avant d'être envoyé sur le front de l'Est dans les montagnes du Caucase. À son retour, «à la place des croix gammées les géraniums ornent les fenêtres des maisons». Le saisissant portrait d'un homme ordinaire qui ne se donne jamais d'autre choix que d'avancer.